Le potentiel énergétique de la ressource en gaz de schiste en Chine est énorme ; La société de conseil et d’aide à la décision, Alcimed, a dressé un état des lieux des réserves exploitables de gaz de schiste en Chine.
Selon l’Energy Information Administration, la Chine possède 36 100 milliards de mètres cubes de réserves, à comparer aux 24 400 milliards de réserves américaines. Le ministère chinois de l’aménagement du territoire et des ressources, lui, est plus mesuré et propose une estimation autour de 31 000 milliards1.
Ces réserves sont réparties sur 7 bassins différents dont cinq particulièrement complexes et difficiles à exploiter à cause de leur teneur en argile et leur friabilité élevées réduisant ainsi l’efficacité de la fracturation hydraulique2.
Les deux régions les plus accessibles, d’un point de vue technique, le Sichuan et le Tarim, sont celles avec le plus fort potentiel de production, mais le positionnement géographique (éloigné des zones principales de consommation) et le stress hydrique dont souffre la région de Tarim poussent les opérateurs à se concentrer sur la région du Sichuan3. Toutefois, le Sichuan est un réservoir plus profond et géologiquement plus complexe à exploiter que ceux que l’on trouve aux Etats-Unis : les ressources sont localisées à plus de 4 km de profondeur, les volumes d’hydrogène sulfuré (H2S) sont élevés, la région est montagneuse et les infrastructures de transport sont limitées.
Premier appel d’offres pour l’exploration et la production de gaz de schiste lancé en juin 2011
La Chine s’intéresse depuis déjà quelques années aux gaz non conventionnels : l’exploitation du Coal Bed Methane (CBM) a pris son essor à partir de 2005 et depuis deux ans, le gouvernement s’intéresse de plus près aux gaz de schiste4.
En juin 2011, le gouvernement chinois a lancé un appel d’offre pour attribuer des permis d’exploration et de production pour quatre régions ; les participants à cet appel d’offre incluaient PetroChina, Sinopec, CNOOC Ltd, Shaanxi Yanchang Petroleum Group et deux entreprises provinciales productrices de gaz de houille, China United Coal Bed Methane (qui appartient aussi à CNOOC) et Henan Provincial Coal Gas Development5. Au final, la Chine n’a attribué de permis que pour deux régions d’environ 2 000 mètres carrés dans la province du Chongqing (Sichuan), le premier àSinopec et le second à Henan Provincial Coal Gas Development6. Le gouvernement avait prévu de lancer un deuxième appel d’offre fin 2011, mais ce projet a pris du retard.
De nombreux défis techniques et environnementaux devront être relevés7 pour l’exploitation des gaz de schiste en Chine
Les caractéristiques géologiques des bassins de gaz de schiste sont très différentes de celles des bassins américains : leur exploitation n’en sera que plus complexe. En outre, le défi est d’autant plus difficile à relever que la Chine ne maîtrise pas les technologies nécessaires pour mener l’exploration et la production.
Ensuite, les infrastructures de transport de gaz en Chine sont insuffisantes. Pour faire en sorte que l’exploitation du bassin du Sichuan soit rentable, les opérateurs vont avoir besoin de construire des infrastructures considérables. Bien entendu, cela éliminera de la course aux gaz de schiste tous les opérateurs locaux qui ne pourront pas financer et porter de projets de ce type, à moins que le gouvernement n’y participe.
Le défi environnemental majeur pour l’industrie est lié à l’eau. Le développement de l’industrie du gaz de schiste requiert de larges volumes d’eau (13 000 mètres cubes par fracturation) dans un pays où les ressources en eau sont déjà limitées. C’est en partie pour cette raison qu’aucun permis n’a encore été émis pour la région du Tarim, qui est en stress hydrique. A l’inverse, dans la province du Sichuan, la ressource en eau est plutôt abondante, mais très largement utilisée pour l’agriculture.
Aussi, si la Chine décide de développer l’industrie des gaz de schiste, il faudra que le recyclage de l’eau devienne la norme8. Selon Sinopec, la Chine a tiré profit de l’expérience américaine en ce qui concerne la problématique « eau » et l’entreprise prévoit d’adopter pour l’extraction une stratégie différente de celles des opérateurs américains, sans préciser laquelle9.
La préférence nationale est de rigueur : les entreprises internationales ne peuvent espérer mettre le pied sur le marché qu’en partenariat avec leurs homologues chinois.
L’appel d’offre de juin 2011 n’était ouvert qu’aux entreprises chinoises, mais les entreprises occidentales étaient invitées à former des partenariats avec les entreprises sélectionnées10. Le gouvernement chinois privilégie clairement les acteurs nationaux, tout en étant conscient que l’expertise en fracturation hydraulique et en forage horizontal se trouve au sein des entreprises occidentales. Ces dernières ne sont donc pas totalement écartées du jeu.
Afin de rattraper leur faible expérience en matière d’exploitation de gaz de schiste, la Chine s’intéresse de plus en plus aux activités américaines depuis environ deux ans. En effet, les entreprises chinoises cherchent à améliorer leurs connaissances techniques en investissant soit dans des bassins, soit dans des producteurs de gaz de schiste américains, comme CNPC qui s’est allié à EnCana, en Colombie Britannique, ou CNOOC qui s’est associé à Chesapeake dans l’Eagleford Shale.
« Début 2012, Sinopec a investi 2,2 milliards de dollars pour acquérir un tiers des investissements de Devon Energy, le plus grand producteur du Barnett Shale, dans cinq régions en développement aux Etats-Unis11 et PetroChina a acquis une part de 20% dans un projet de gaz de schiste au Canada, opéré par Shell12. De plus, en ce moment, Sinopec et CNOOC envisagent tous deux d’acquérir chacun une partie de Frac Tech International, spécialiste américain de la fracturation hydraulique13» précise Cécile Marion, Consultante dans l’activité Energie & Environnement d’Alcimed.
A cela s’ajoutent les partenariats en Chine entre des sociétés étrangères et les grandes sociétés chinoises : d’abord destinés à assurer l’exploitation de CBM14, ils se positionnent maintenant sur l’exploitation de gaz de schiste. Dans le Sichuan, on retrouve des coopérations entre ConocoPhillips ou Shell et PetroChina ou encore BP ou Total et Sinopec. Outre les alliances avec les grandes sociétés étrangères, les géants chinois s’allient aussi avec de petits indépendants américains comme Newfield Exploration (dans le Sichuan)15.
En plus de devoir maîtriser les techniques d’exploitation des gisements de gaz de schiste, les opérateurs chinois doivent maîtriser les techniques d’exploration, et cela passe aussi par des partenariats avec des entreprises occidentales : BP et Sinopec ont lancé la première fracturation hydraulique en Chine en mai 2010 et Shell, de son côté, a travaillé avec PetroChina pour forer le premier puits horizontal en 2011 16.
Les autres défis techniques et environnementaux, comme la construction d’infrastructures de transport ou la gestion de l’approvisionnement en eau, devront aussi être gérés par les opérateurs ou leurs partenaires. « Là aussi, les entreprises spécialistes de la performance environnementale ou les entreprises ayant opéré aux Etats-Unis pourront faire profiter les opérateurs Chinois de leur expertise et/ou de leur expérience, » explique Jean-Philippe Tridant Bel, Responsable de l’activité Energie & Environnement d’Alcimed.
Au final, la Chine prévoit de lancer une exploitation commercialement viable des gaz de schiste dès 2014 et d’atteindre une production annuelle de 6,5 milliards de mètres cubes en 201517 (contre 90 milliards de mètres cubes produits aux Etats-Unis en 2010). Mais le défi n’est pas encore relevé !
1 Forbes: ici
2 Bernstein Research (.pdf) : ici
3 Bernstein Research (.pdf) : ici
4 “CBM – Another green solution“, Merrill Lynch, June 2007
5 Reuters : ici
6 Reuters : ici
7 Note : ici
8 NY-Times : ici
9 Note : ici
10 Reuters : ici
11 ici
12 Bloomberg : ici
13 Reuters : ici
14 Coal Bed Methane
15 Source : « Les perspectives du shale gas dans le monde », IFRI, Bruno Weymuller, Décembre 2010
16 ici
17 ici
Nos économies consuméristes sont en grande partie à l’origine de cette gourmandise énergétique. Le poids important des exportations dans la logique économique chinoise actuelle rend impossible tout changement. Afin de supporter leur développement les Chinois n’ont d’autre choix que de continuer à produire pour le moins cher possible. A ce titre, le coût de l’énergie est un facteur déterminant. Si nous craignons le recours à ces gaz dits « non conventionnels » ayons le courage de faire évoluer notre modèle de vie. Rendre caduque la cavalcade énergétique de « l’atelier du monde » c’est avant tout changer le comportement des marchés destinataires du « made in China ». Il faut aller vers une mondialisation des peuples, des idées, et quitter une mondialisation des productions et des capitaux.
allons-y gaiement, quand y’aura plus que des cailloux à bouffer il restera toujours quelques oasis préservées pour les « dirigeants éclairés » qui auront su mener nos sociétés dans une impasse dorée vu le soin que les chinois portent à leur propre environnement (cf industrie de fabrication de Jean’s qui ont déjà asséché, ravagé des territoires entiers), il y a fort à parier que le CARNAGE de schiste sera sans commune mesure après moi « eh oh, eh oh, on rentre du boulot tralalalala…. »
La Chine avance à pas de géants en matière d’énergie pendant qu’on débat sur le principe de précaution… Gaz de schiste, EPR, renouvelables, ils ont un temps d’avance.
très égoïste, peut être que les chinois pèseront moins sur la demande en pétrole et gaz du Moyen Orient. Or ce sont en grande partie eux qui poussent les prix. L’illuminé de Téhéran aura besoin de vendre son pétrole. Autre point positif (rêvons un peu), ils vont peut être nous trouver une solution d’extraction plus respectueuse de l’environnement, who knows ?
Source ALCIMED