Concernant le secteur de l’énergie et des ressources, l’année 2012 s’ouvre sur de grandes incertitudes, car malgré de fortes tensions sur les capacités de production d’énergie primaire, une absence de consensus sur le mix énergétique, les interrogations sur la dépendance énergétique ou la persistance de la « bulle » gazière et des enjeux géopolitiques croissants, le secteur doit malgré tout répondre à une demande mondiale toujours croissante : +15% pour le pétrole, +45% pour le gaz, +20 à +60% pour le charbon et +50% pour l’électricité dans les vingt ans à venir (Source : AIE).
Impliquant d’importants investissements d’infrastructures estimés à 38 000 milliards de dollars par l’AIE, la satisfaction de la demande croissante doit par ailleurs se coupler à l’impérieuse nécessité d’atteindre les objectifs de réduction des émissions de CO2 à un coût supportable.
« Au cours de cette année, divers évènements géographiquement dispersés ont eu une grande incidence sur les secteurs de l’énergie et des ressources. Les conséquences du « printemps arabe » sur les marchés pétroliers, le renchérissement des matières premières, le débat sur l’avenir du nucléaire, les volontés politiques de réduire la dépendance énergétique mais aussi les politiques de soutien aux énergies renouvelables en faveur du mix énergétique affectent considérablement ces deux secteurs et les bases de l’économie mondiale », précise Véronique Laurent, Associée Responsable du secteur Energie & Ressources chez Deloitte.
Dans ce contexte, Deloitte livre les réflexions de ses experts de l’énergie sur les tendances à venir. Dix prédictions issues à la fois d’analyses sectorielles et de consultations auprès d’opérateurs et d’analystes du secteur de l’énergie et des ressources.
Les terres rares, nouvelles « commodities » qui ont besoin d’un marché physique et financier
Bien que les gisements soient nombreux dans le monde, les stocks sont finis et leur extraction difficile, coûteuse et polluante. L’offre, concentrée en Chine et soumise à des quotas d’exportation en baisse, se confronte à une demande croissante. L’organisation d’un marché physique et financier au plan mondial et le développement de filières de recyclage deviennent incontournables.
Le modèle pétrolier intégré serait-il moins valorisé ?
Malgré une industrie pétrolière consolidée via des fusions de grande ampleur dans un contexte de prix pétroliers déprimés et de rationalisation des dépenses d’exploration-production au tournant du siècle, la valeur des majors s’établit aujourd’hui en-dessous de celle des producteurs indépendants, « purs players ». De plus, ayant vraisemblablement découvert des réserves supérieures aux majors au cours des dernières années, les « purs players » vont-ils réviser le modèle pétrolier traditionnel ?
Vers un âge d’or du gaz… non conventionnel
La demande gaz est portée par de nombreux éléments : les débats autour de l’évolution du nucléaire dans certains pays , les capacités sur charbon pénalisées par les réglementations nouvelles ou encore la politique chinoise de développement forcé du gaz. Cette demande croissante est satisfaite par une offre surabondante, liée à la découverte de gisements majeurs (Mozambique…) et à l’arrivée sur le marché de nouvelles capacités de GNL (Angola…). Mais loin d’être sans impacts économiques et financiers, cette « bulle » gazière – notamment due aux productions significatives de Shale Gas aux US à des prix faibles – créée :
une concurrence « gaz-gaz » qui pourrait s’étendre au niveau mondial si les US deviennent exportateurs, de fortes distorsions de prix au niveau mondial entre les marchés gaziers indexés pétrole (EU et Asie) et les marchés concurrentiels (US, UK).
Le solaire thermique devient compétitif pour l’industrie
Dans le domaine de l’extraction pétrolière, le recours au solaire thermique, préférablement à la réinjection de gaz, permet d’augmenter la récupération de pétrole tout en laissant disponibles les quantités de gaz associées. Dans les pays à fort ensoleillement, le solaire thermique devient alors compétitif et libère des ressources.
La nano-économie au secours de la macro-économie: révolution des nanotechnologies au service de l’énergie
Alors qu’il était de 40 milliards de $ en 2001, le marché des nanotechnologies serait estimé à 1000 milliards de $ sur les quinze années à venir. Selon les chercheurs, les nanoparticules pourraient accomplir le saut technologique attendu dans le domaine de l’énergie en matière d’efficacité énergétique, de transport et de stockage électriques.
L’eau : l’alpha et l’oméga de l’énergie… surtout décarbonée
Aujourd’hui au cœur des problématiques stratégiques de beaucoup de grands groupes, la mesure de l’intensité « hydrique » des acteurs de l’économie s’impose sur l’ensemble de la chaîne de valeur : risques physiques et d’approvisionnement, risques réglementaires ou de réputation… A l’heure où la génération électrique décarbonée entraîne une hausse des besoins en eau de 45 à 90%, ceux liés à l’empreinte Eau constituent désormais un enjeu majeur nécessitant la mise en place d’un référentiel commun de mesure, d’évaluation et de reporting de l’usage de l’eau.
Péril en haute mer : le coût de la piraterie pour l’économie mondiale
Coûtant à l’économie mondiale entre 7 et 12 milliards de $ par an, l’essor de la piraterie affecte directement le commerce mondial. Avec le trafic pétrolier directement impacté et l’hésitation de l’OTAN à intégrer la responsabilité de la sécurité pétrolière, les compagnies maritimes doivent compter sur leurs propres initiatives en matière de sécurité ainsi que sur leurs compagnies d’assurance.
Récession, pouvoir d’achat et efficacité énergétique
Dans le cadre d’une enquête de Deloitte US après la crise, la majorité de consommateurs donne la priorité à la réduction de leur facture énergétique sur la réduction de leur empreinte carbone. Toutefois peu d’entre eux s’engagent concrètement dans cette voie. Au niveau européen, avec 7% du budget des ménages consacré à la dépense énergétique, la réduction de la demande permettrait de concilier gains de pouvoir d’achat et gains d’efficacité énergétique. C’est de ces derniers que dépendent 70 à 100% de la réduction des émissions du CO2 jusqu’en 2020
Renouvelables : un objectif européen… créateur d’emplois en Chine ?
Avec les objectifs de développement des énergies renouvelables dans l’ensemble des pays européens et la difficile émergence de filières européennes (notamment celle des technologies solaires), il semble urgent de passer d’une politique de soutien aux productions d’énergies renouvelables à une politique de soutien aux productions de technologies renouvelables.
Nucléaire: sans alternative ? Quelles technologies pour demain ?
La catastrophe de Fukushima a conduit quelques pays à la décision de sortir du nucléaire (Allemagne, …) ou à revoir leurs projets. Toutefois, le scenario post-Fukushima de l’AIE affiche une croissance du nucléaire de l’ordre de 70% sur 25 ans. Aujourd’hui indispensable au mix énergétique vers lequel nous devons tendre, existe-t-il une alternative à cette énergie ?
Enfin, bien qu’aucun cadre réglementaire européen sur le stockage long terme ne soit à ce jour fixé, la concurrence entre les nouvelles technologies de génération nucléaire s’organise autour des référentiels de sécurité et des offres de financement associées.
« L’innovation au service du secteur de l’énergie demeure aujourd’hui incontournable pour son développement et la satisfaction d’une demande croissante : compte-tenu de l’augmentation des contraintes pour les entreprises du secteur notamment liées à l’efficacité énergétique, aux infrastructures de transports, de distribution et de stockages ainsi que la disponibilité des ressources naturelles telles que l’eau, l’essor de la nano-économie et la compétitivité du solaire thermique dans l’industrie constituent des leviers de croissance majeurs pour ce secteur.» conclut Jean-Michel Gauthier, Chief Economist Officer, Energie & Ressources, chez Deloitte.
Un rapport récent sur les ressources (énergies fossiles et autres matières premières) : (à lire avec le coeur bien accroché ! )
Merci pour ce terrifiant rapport. D’ici 20 ans, on va effectivement manquer de tout, Sauf hélas de charbon.
Le nucléaire reste sans véritable alternative? Espérons seulement que les vieilles chaudières à uranium qui sont dangeureuses en l’absence de refroidissement soient remplacées le plus rapidement possible par les réacteurs de 4éme génération pour commencer à brûler les déchets que nous continuons à produire. Comme il devient vraiment urgent de limiter l’emploi du gaz du charbon et du pétrole sous peine de détruire la planète à court ou moyen therme, je suis pessimiste, il n’y a pas vraiment de solution acceptable, surtout que la demande en électricité va croissant partout dans le monde. Donc l’énergie issue de l’atome reste très atractive pour les pays en voie de développement (et les autres), espérons que les chercheurs vont pondre rapidement (10 à 30 ans) des générateurs à neutrons rapides ou au thorium fiables et sans dangers pour les populations et ce en attendant la fusion. Les gros gros soucis pour l’avenir restent devant nous !!!!!