Enerdata, le cabinet d’études et de conseil indépendant spécialisé dans le secteur de l’énergie a réalisé une petite étude sur le Charbon intitulé "Compétition de la Chine et de l’Inde autour des ressources en charbon"
Les prises de contrôle de ressources pétrolières et gazières se multiplient sur tous les continents. Celles de ressources charbonnières aussi, mais, en Europe, on le sait moins.
Bien que l’Allemagne et la Pologne construisent une dizaine de centrales thermiques charbon, les combustibles solides semblent appartenir au passé. Le principal champ sur lequel s’affrontent leurs acteurs s’est, en outre, déplacé du proche Atlantique au lointain Pacifique.
Le charbon ne cesse cependant de consolider sa place de second dans le bilan énergétique mondial (28 %) juste derrière celle du pétrole (32 %) et devant celle du gaz (22%), à la fois parce qu’il reste la principale source de production d’électricité (40 %) et parce qu’il est le socle de la forte croissance énergétique des économies émergentes d’Asie.
Certaines d’entre elles ayant épuisé leurs réserves sont devenues de grandes importatrices (Japon, Corée, Taiwan). D’autres, encore riches, doivent compléter leur production nationale par des importations (Chine et surtout Inde1). Derrière ces dernières, Indonésie, Vietnam, Thaïlande ou Philippines restent aux aguets.
Tous ces pays, en effet, redoutent de se trouver exclus du partage des ressources qui bordent le Pacifique, des confins de la Sibérie et de la Mongolie aux territoires encore peu explorés d’Afrique australe, en passant par ceux des grands exportateurs actuels que sont l’Australie, l’Indonésie, l’Afrique du Sud et même le Canada et la Colombie.
Croissance annuelle moyenne de la production et de la consommation de charbon et lignite (2005-2010) dans une sélection de pays
Sur les quatre continents auxquels appartiennent ces pays, la compétition prend un tour de plus en plus vif. Les compagnies japonaises, telle Mitsubishi, engagées de longue date en Australie aux côtés de multinationales comme BHP-Billiton ne paraissent pas les plus agressives. Il en va différemment des groupes chinois intéressés par les adjudications de nouveaux périmètres d’exploration ou les achats d’actifs de compagnies locales dans la plupart des pays disposant de ressources charbonnières. Leur offre est souvent assortie de la proposition de construire une voie ferrée d’évacuation du minerai ou une centrale thermique destinée à consolider le parc électrique du pays d’accueil.
Ces groupes chinois, dont Shenhua est le plus emblématique, entrent de plus en plus fréquemment en compétition avec des groupes indiens, fortement soutenus par leur gouvernement soucieux de l’avenir de ses industries électriques et sidérurgiques.
L’entrée de Tata Power dans Bumi Resources en Indonésie avait ouvert une voie dans laquelle se sont engouffrées nombre de compagnies : en Australie où Adani installe une chaîne intégrée de 20 Mt/an qui se termine à Mundra en Inde ; au Mozambique où Tata Steel s’est alliée à l’australien Riversdale pour affronter le brésilien Vale en vue d’exploiter les grands gisements du bassin du Tete. Dans la même région, Chinois et Indiens se retrouveront vraisemblablement face à face au Botswana dès que sera éclaircie la question des itinéraires d’évacuation du minerai.
Les conséquences de cette compétition dans la plupart des pays riverains du Pacifique sont multiples. Sous l’angle de l’économie, l’ouverture de nouveaux champs (greenfields), presque tous à ciel ouvert, limite la tendance à la hausse des coûts d’exploitation des charbons vapeur et cokéfiables.
En outre, les aménagements portuaires qui suivent favorisent la densification des échanges (le milliard de tonnes est sur le point d’être franchi), donc la concurrence et la forte compétitivité du charbon sur le marché des gros usages sous chaudière.
Sous l’angle de l’écologie, les résultats sont inverses puisque le recours accru au charbon dans les pays à forte croissance énergétique pousse les émissions de CO2 bien au-delà du plafond fixé par le GIEC pour éviter de graves dérèglements climatiques.
Sous l’angle de la géopolitique, l’entrée des grands investisseurs asiatiques est fréquemment source d’inquiétude : en Australie, elle s’est exprimée à plusieurs reprises à l’égard des groupes chinois par des protections plus ou moins déguisées ; au Canada, elle est plus récente mais non moins vive ; en Mongolie, la confrontation Chine-Russie revêt la forme de projets ferroviaires concurrents pour évacuer la production du désert de Gobi, notamment celle de l’énorme gisement de Tavan Talgoi ; en Sibérie orientale, ce sont les perspectives d’exploitation d’Elga, autre gisement géant, qui aiguisent la compétition entre Chine et Japon.
Les Etats-Unis et l’Europe occidentale resteront-ils simples spectateurs de cette compétition lointaine ? Ce n’est pas certain, puisqu’elle se répercute déjà sur les exportations étasuniennes qui se réorientent vers le Pacifique via de nouveaux aménagements portuaires sur sa côte ouest. Elle a aussi été à l’origine d’une mission indienne venue prospecter la possibilité d’acquérir des mines de charbon en Europe centrale.
1 : La Chine a importé 6% de sa consommation en 2010 alors qu’elle était exportatrice nette jusqu’en 2008 : elle a représenté 15% des importations totales mondiales en 2010. Les importations de l’Inde sont elles passées d’un peu moins de 10% de sa consommation en 2000 à 19% en 2010 (9% des importations mondiales en 2010).
Graphique 1 – Source: Global Energy Data – Enerdata
Graphique 2 – Source : Enerdata, modèle POLES
aucunes réactions ??
Avec les religions, ces tracations sur l’énergie sont l’expression d’un neo colonialisme larvé qui va mettre à genoux l’occident. L’Europe, a défaut de pouvoir présenter des positions économiques crédibles, restera avec ses espoirs de monde nouveau et moins sale pendant que d’autres vont polluer notre athmosphère….
Loin du coeur. Est ce parce que le Pacifique est loin de la Métropole que ces enjeux du charbon nous indiffèrent ? Et pourtant c’est aussi à côté de chez nous, avec nos chers voisins allemands et polonais aux centrales à charbon… Que pouvons nous y faire aussi ? Ces enjeux d’énergie sont tellement stratégiques dans un monde d’économie libéral ! La liberté est un droit fondamental, mais elle s’arrête là où commence celle des autres. Et ma liberté est de respirer un air contenant moins de pollutions CO2, entraînant les catastrophes climatiques du réchauffement planétaire. Une voie envisageable: la taxe/compensation carbone, à décider (imposer ?) au niveau mondial. Que les pollueurs soient les payeurs du développement des énergies renouvelables !
La production d’électricité à partir de gaz naturel se développe. En 2010, elle représente déjà 3% de la production EDF, contre 3,6 % pour le charbon, 1.6 % pour le fioul et 81 % pour le nucléaire.(1) Le gaz naturel bénéficie d’une réputation de propreté. Mais cela n’est-il pas une illusion basée sur son aspect incolore ? Le charbon n’est-il pas injustement victime d’une image d’Epinal, tout autant véhiculée par sa couleur que par les résidus solides inévitablement produits lors de sa combustion ? Le gaz naturel et le charbon sont tous deux émetteurs de gaz à effet de serre. C’est effectivement le charbon qui en émet le plus, le rapport est de 1,41 en défaveur du charbon. Gaz naturel 2394 kgCO2/tep (PCI) (2) Charbon 3990 kgCO2/tep (PCI)(2) Le gaz naturel est également utilisable directement en chauffage et en cuisson, ce qui n’est plus le cas depuis longtemps pour le charbon. En chauffage, son rendement est de 83% sur PCI pour un usage domestique. C’est à cette utilisation que l’on se doit de comparer le MWé gazier. Considérons le cas d’un cycle combiné gaz d’un rendement de 57% (3) Le rapport des rendements est de 1,45 en défaveur du CCG. Et encore, pour être rigoureux, il faudrait prendre en compte les pertes de transport de l’électricité, ce qui majore ce chiffre. L’utilisation du gaz naturel en production d’électricité produit 45% de plus de CO2 qu’en usage domestique direct. ! Utiliser directement le gaz naturel est donc un moyen de réduire les émissions de CO2 pour autant que cela conduise à une réduction concomitante de la consommation d’électricité. Remarque : Afin de ne pas biaiser le comparatif et de comparer des rendements sur PCI, j’ai volontairement pris le cas le plus défavorable, à savoir une utilisation domestique en chaudière à gaz naturel sans condensation Les contraintes de la production et du transport d’électricité et du gaz ne sont pas identiques du simple fait de la faible vitesse de transport du gaz dans les canalisations.(4) Il faut donc prévoir avec certitude la demande de gaz, et donc celle d’électricité. Ce sera sans nul doute un tache de plus en plus ardue alors que les CCG auront un rôle clef dans la compensation des productions intermittentes. En effet, le développement de l’éolien conduit à une plus grande variabilité de l’offre. C’est un peu la quadrature du cercle En France la mauvaise image du charbon est lié à son passé industriel. Pourtant, on économiserait beaucoup de CO2 en réhabilitant le charbon dans la production d’électricité. Les évolutions technologiques du charbon sont matures : • Le supercritique classique La voie qui paraît la moins risquée est l’adoption de cycles supercritiques avec des perfectionnements de l’aubage haute pression et haute température des turbines à vapeur. Le rendement pourrait atteindre 48%. • Le LFC supercritique Des conditions de vapeur supercritique peuvent être utilisées pour les chaudières à lit fluidisé (pression atmosphérique ou sous pression) et des rendements de l’ordre de 45 % pourront être atteints dans un proche avenir • Le cycle combiné à gazéification intégrée (IGCC) Une solution alternative est de gazéifier le charbon. C’est un procédé éprouvé, par exemple à Puertollano (Espagne) Le surcoût par rapport à un cycle combiné gaz est de 20%. De plus l’emprise au sol est plus importante et le délai de construction accru. C’est tout de même la solution la moins productrice de CO2 car elle s’appuie sur le cycle combiné qui constitue le meilleur rendement thermodynamique, à savoir, les 57% donnés pour le CCG. Par ailleurs, le captage de CO2 sera plus facile à partir de ce process. Sources : 1-France > EDF en France > Information sur l’origine de l’électricité 2 –MEDD, questionnaire de déclaration annuelle des émissions polluantes 2005 des installations classées soumises à autorisation 3- Construction d’un cycle combiné gaz Blénod-lès-Pont-à-Mousson 4 – GRT gaz Note d’intention offre de transfert pour le flexibilité nécessaire aux cycles combinés gaz. 23 janvier 2009 5- Charbon propre mythe ou réalité ? Groupe de travail sur le charbon du Délégué interministériel au développement durable. Glossaire : PCI Pouvoir Calorifique Inférieur CCG Cycle Combiné Gaz MWé Mégawatts électriques LFC Lit Fluidilisé Circulant IGCC cycle combiné à gazéification intégrée
Bon, ça me paraît bizarre cette soit-disant guerre du charbon quand on connaît l’énorme, fulgurant et inexorable essor des EnR qui sont déjà capables d’éradiquer le nucléaire sans qu’il ait eu le temps de dire ouf. A mon avis le charbon est une énergie du passé qui va décliner sous les coups répétés de l’éolien et du photovoltaïque. Les Allemands peuvent d’ailleurs facilement expliquer la voie à suivre aux Chinois et aux Indiens. On ne va tout de même pas continuer à produire de l’électricité en faisant chauffer de l’eau dans une bouilloire. En tout cas, mes lectures assidues des commentaires d’Enerzine me le laisse penser !
Pour thermo. « En France la mauvaise image du charbon est lié à son passé industriel. Pourtant, on économiserait beaucoup de CO2 en réhabilitant le charbon dans la production d’électricité. » Vous pouvez nous la refaire celle-là en tenant compte des émissions des centrales thermiques en France en 2011 estimées par RTE à 24 millions de tonnes pour 542 TWh produits ?
Ce n’est peut être pas un pro-charbon, c’est peut être simplement un « écologiste » visionnaire et lucide qui redoute de ne pouvoir sortir du nucléaire sans avoir recours au charbon :
Une rétrospective du charbon autour du monde.
Bien trouvé rouget. Enfin, ils vont quand même pas se plaindre, ils auraient avoir du nucléaire comme en France ! Faut simplement aller leur expliquer.
On ne se lasse vraiment jamais des communiqués de Stop-Nogent, pourtant pas si vieux!
Merci rouget, je vois bien que vous allez chercher des arguments rationnels pour comparer la dangerosité des filières qui comptent. Bien sûr, le charbon est en expansion rapide (plus que les EnR en valeur absolue). Mais rien n’y fera, car rien n’égalera jamais un mort nucléaire (fût-il à venir). Que valent 10 000 morts silencieux du charbon qui ne feront jamais la une des journaux (et pas souvent d’Enerzine) face à un mort (voir un simple contaminé) ayant fait une overdose de Becquerels ? Quand bien même, des contaminés par des rejets radioactifs d’une cheminée de centrale à charbon seraient identifiés, ils ne péseraient pas lourd car ils n’auraient pas été contaminés par des Becquerels nucléaires (qui sont beaucoup plus dangereux). Non, vous ne ferez rien contre le fameux coefficient de pondération médiatique qui est bien trop favorable au nucléaire :