Un moteur nanométrique dont le sens de rotation peut être inversé à volonté a été réalisé par une équipe franco-américaine composée de chercheurs du Centre d’élaboration de matériaux et d’études structurales (CEMES, CNRS) et de l’Université d’Ohio.
Pour la première fois, ils ont atteint la taille limite inférieure pour un dispositif capable de transformer l’énergie en mouvement de rotation. De seulement 2 nanomètres de diamètre, le rotor de ce moteur est mis en mouvement grâce aux électrons délivrés par la pointe d’un microscope à effet tunnel. Publiés dans le numéro de janvier 2013 de Nature Nanotechnologies, ces travaux explorent la mécanique et l’énergétique des « molécule-moteurs » et annoncent les composants des futurs robots nanométriques.
Le nano-moteur est composé de trois parties. La première constitue le stator du moteur qui permet de l’accrocher à une surface d’or. Au bout de celui-ci, se trouve un atome métallique, du ruthénium, qui joue le rôle de rotule sur laquelle vient se fixer le rotor moléculaire. Ce dernier est constitué de cinq pales dont une a été volontairement raccourcie pour suivre le sens de rotation du rotor. Au total, seulement 200 atomes constituent le moteur. Pas moins de 15 étapes ont été nécessaires pour la synthèse de cette molécule complexe. Sa conception et synthèse ont demandé près de 10 ans d’efforts aux chercheurs du CEMES.
En plaçant la molécule à une température de –268,5°C (4,6°C au-dessus du zéro absolu) sur la surface d’or, les chercheurs sont parvenus à déclencher le mouvement pas à pas du rotor et à en contrôler le sens de rotation. Pour cela, ils lui ont délivré des électrons grâce à la pointe d’un microscope à effet tunnel qui sert à la fois d’instrument d’observation et de source d’énergie. Le sens de rotation dépend de la pale du rotor où est positionnée l’extrémité de la pointe du microscope. La précision dans le pointage doit être de l’ordre du dixième de nanomètre.
À présent, les chercheurs veulent mesurer la puissance délivrée par ce nano-moteur. Pour y parvenir, ils doivent placer la molécule en interaction avec les plus petits engrenages solides qu’il soit possible actuellement de fabriquer. Les chercheurs imaginent que des moteurs tels que celui-ci pourront un jour entrer dans l’assemblage de nano-robots ou de nano-véhicules que les chercheurs du CEMES étudient par ailleurs.
© G. Rapenne et G. Vives, CEMES, CNRS/UPS
La « molécule-moteur » est ancrée sur une surface via trois points d’accroche. Le plateau supérieur tourne dans un sens ou dans l’autre autour de son axe, selon la position de la pointe du microscope.
Références :
Controlled clockwise and anticlockwise rotational switching of a molecular motor
U. G. E. Perera, F. Ample, H. Kersell, Y. Zhang, G. Vives, J. Echeverria, M. Grisolia, G. Rapenne, C. Joachim and S.-W. Hla // Nature Nanotechnology, 2013, 8, 46-51.
On entre dans des domaines aux applications insoupçonnées !
C’est effectivement incroyablement petit. Une fois la puissance définie, je serai curieux de connaitre le rendement? Quant aux applications à -268°C, elles sont quand même limitées non?