Ils sont considérés comme les meilleurs isolants au monde. Toutefois les aérogels à base de silice seule sont cassants et ont tendance à former de la poussière.
Avec le développement d’un aérogel hybride utilisant des biopolymères, des chercheurs de l’Empa et de MINES ParisTech ont éliminé ces inconvénients tout en conservant à ce matériau poreux ultraléger ses extraordinaires propriétés isolantes.
Les pectines sont des polysaccharides végétaux, et donc des matières premières durables et écologiques. Elles sont tirées par exemple des pommes et sont entre autres utilisées dans l’industrie comme gélifiant. Les chercheurs de l’Empa ont développé partir de pectine une aérogel hybride ultra-isolant ainsi qu’ils l’ont rapporté dans la revue scientifique «Angewandte Chemie».
En Suisse 1,5 millions de bâtiments auraient besoin d’une rénovation. Du fait de leur isolation insuffisante, ces immeubles gaspillent une quantité d’énergie que les experts estiment à près de 70 pourcent de la consommation actuelle d’énergie de chauffage. Une meilleure isolation réduirait leur empreinte environnementale et permettrait de réaliser des économies de l’ordre de plusieurs milliards de francs. Toutefois, particulièrement sur les bâtiments historiques, les rénovations ne sont souvent possibles que dans le cadre de prescriptions légales contraignantes.
Les aérogels : d’excellents isolant qui sont toutefois fragiles
Il y a environ trois ans, des chercheurs de l’Empa ont développé avec l’entreprise Fixit AG un crépi isolant à base d’un granulat d’aérogel de silice dont la conductibilité thermique n’est que de 28 mWm-1K-1 (milliwatt par mètre et degré Kelvin), par rapport à 12 à 15 mWm-1K-1 pour l’aérogel de silice pur. Une valeur record due à la structure du matériau: les aérogels de silice sont constitués pour plus de 95 pour-cent de pores remplis d’air et d’environ cinq pour-cent seulement d’un réseau de nanoparticules. Les molécules d’air enfermées dans les pores ne peuvent quasiment pas bouger librement ce qui réduit à un minimum les pertes thermiques.
De plus, les aérogels sont quasiment transparents, ils ne possèdent ainsi pas de couleur propre ce qui permet de les utiliser pour l’isolation des bâtiments anciens en respectant les exigences de la protection du patrimoine et sans modifier l’aspect des bâtiments historiques.
Toutefois les aérogels de silice ont du mal à s’imposer sur le marché; les gens de métier leur reprochent leur coût élevé et leur fragilité ainsi qu’une tendance à former de la poussière lors de leur mise en œuvre.
[ Avec le développement d’aérogels hybrides de silice et de pectine, les chercheurs ont ouvert une nouvelle voie dans la recherche sur les aérogels de biopolymères et de silice. Les propriétés mécaniques et thermiques des aérogels hybrides obtenus varient suivant le pH et la teneur en pectine de la solution initiale. ]
De meilleures propriétés mécaniques grâce à la pectine des pommes
Les liaisons entre les nanoparticules de silice sont en effet extrêmement fines comme le montrent les micrographies électroniques.
C’est ce qui a incité les chercheurs de l’Empa réunis autour de Matthias Koebel et leurs collègues de MINES ParisTech à vouloir améliorer les propriétés mécaniques des aérogels. Pour cela, ils ont emprunté une voie peu empruntée jusqu’ici pour développer un aérogel hybride formé de silice et du biopolymère qu’est la pectine (que l’on trouve par exemple dans les pommes). Ils ont ainsi créé une nouvelle classe de matériau qui présente des propriétés mécaniques nettement meilleures. Cet aérogel hybride peut être comprimé jusqu’à 80% sans se rompre. Les scientifiques expliquent que cette amélioration est due à la morphologie du réseau que forment la pectine et la silice dans lequel les nanoparticules sont reliées par des «ponts» notablement plus robustes que ceux unissant les particules de silice dans les aérogels classiques. Une résistance accrue qui diminue aussi la formation de poussière.
Et le point décisif: suivant sa teneur en pectine, la conductibilité thermique de cet aérogel hybride varie entre 14 et 17 mWm-1K-1, soit un peu plus seulement que celle des aérogels de silice classiques. Avec leur innovation ces chercheurs ont atteint simultanément trois buts: cet aérogel hybride est mécaniquement robuste, il est ultra-isolant et sa fabrication ne demande que des matières premières biologiques et minérales. De plus, ces chercheurs ont développé un procédé de fabrication écologique à partir d’une solution aqueuse qui devrait permettre une production de cet aérogel hybride à l’échelle industrielle, ainsi qu’ils l’ont relevé dans l’article publié récemment dan la revue scientifique «Angewandte Chemie»
Reference : //dx.doi.org/10.1002/ange.201507328
avec impatience, la mise en circulation « commerciale » ! (pourvu que la culture des pommes à fins d’isolation ne vienne pas concurrencer l’alimentaire)