Les chercheurs du National Institute of Standards and Technology (NIST) ont réussi à réduire considérablement le temps et l’énergie nécessaires pour refroidir des matériaux à quelques degrés au-dessus du zéro absolu, en modifiant un réfrigérateur couramment utilisé dans la recherche et l’industrie.
Un réfrigérateur essentiel pour de nombreux dispositifs et capteurs
La réfrigération ultra-froide est essentielle au fonctionnement de nombreux dispositifs et capteurs, de la stabilisation des qubits (l’unité de base de l’information dans un ordinateur quantique) au maintien des propriétés supraconductrices des matériaux, en passant par le refroidissement du télescope spatial James Webb de la NASA pour lui permettre d’observer les cieux. Pendant des décennies, le réfrigérateur à tube à impulsions (PTR) a été l’appareil de prédilection pour atteindre des températures aussi froides que le vide de l’espace.
Ces réfrigérateurs compriment (chauffent) et détendent (refroidissent) cycliquement de l’hélium gazeux à haute pression pour obtenir le «Big Chill», de manière globalement analogue à la façon dont un réfrigérateur domestique utilise la transformation du fréon de liquide en vapeur pour éliminer la chaleur. Pendant plus de 40 ans, le PTR a prouvé sa fiabilité, mais il est également gourmand en énergie, consommant plus d’électricité que tout autre composant d’une expérience à très basse température.

Une efficacité énergétique améliorée grâce à des modifications
Lorsque Ryan Snodgrass, chercheur au NIST, et ses collègues ont examiné de plus près le réfrigérateur, ils ont constaté que les fabricants l’avaient conçu pour être économe en énergie uniquement à sa température de fonctionnement finale de 4 kelvins (K), soit 4 degrés au-dessus du zéro absolu. L’équipe a découvert que ces réfrigérateurs sont extrêmement inefficaces à des températures plus élevées, ce qui pose un gros problème car le processus de refroidissement commence à la température ambiante.
Au cours d’une série d’expériences, Snodgrass et ses collègues scientifiques du NIST, Joel Ullom, Vincent Kotsubo et Scott Backhaus, ont découvert qu’à température ambiante, le gaz d’hélium était sous une pression si élevée qu’une partie était déviée par une soupape de décharge au lieu d’être utilisée pour le refroidissement. En modifiant les connexions mécaniques entre le compresseur et le réfrigérateur, l’équipe s’est assurée qu’aucune quantité d’hélium ne serait gaspillée, améliorant ainsi considérablement l’efficacité du réfrigérateur.
Un temps de refroidissement réduit grâce à un ajustement continu
Les chercheurs ont notamment ajusté en permanence une série de vannes qui contrôlent la quantité de gaz d’hélium circulant du compresseur au réfrigérateur. Les scientifiques ont constaté que s’ils permettaient aux vannes d’avoir une ouverture plus grande à température ambiante, puis les fermaient progressivement à mesure que le refroidissement se poursuivait, ils pouvaient réduire le temps de refroidissement de moitié à un quart de ce qu’il est actuellement.
Actuellement, les scientifiques doivent attendre un jour ou plus pour que les nouveaux circuits quantiques soient suffisamment froids pour être testés. Étant donné que le progrès de la recherche scientifique peut être limité par le temps nécessaire pour atteindre les températures cryogéniques, le refroidissement plus rapide fourni par cette technologie pourrait avoir un impact considérable sur de nombreux domaines, notamment l’informatique quantique et d’autres domaines de la recherche quantique.
La technologie développée par l’équipe du NIST pourrait également permettre aux scientifiques de remplacer les grands réfrigérateurs à tube à impulsions par des modèles beaucoup plus petits, qui nécessitent moins d’infrastructure de soutien, a déclaré Ryan Snodgrass.
Des économies substantielles et une accélération de la recherche
Le besoin de ces réfrigérateurs va considérablement augmenter à mesure que la recherche sur l’informatique quantique, ainsi que sa dépendance à la technologie cryogénique, continuera de croître. Le réfrigérateur à tube à impulsions modifié permettrait alors d’économiser une quantité beaucoup plus importante d’argent, d’énergie électrique et d’eau de refroidissement.
En plus de soutenir une économie quantique en plein essor, le dispositif accélérerait également la recherche, car les scientifiques n’auraient plus à attendre des jours ou des semaines pour que les qubits et autres composants quantiques se refroidissent.
Selon les estimations des chercheurs, leur prototype, qu’ils s’efforcent maintenant de commercialiser avec un partenaire industriel, pourrait permettre d’économiser chaque année environ 27 millions de watts d’électricité, 30 millions de dollars de consommation mondiale d’électricité et suffisamment d’eau de refroidissement pour remplir 5 000 piscines olympiques.
Article : « Dynamic acoustic optimization of pulse tube refrigerators for rapid cooldown » – DOI: 10.1038/s41467-024-47561-5
Légende illustration : Les animations montrent une version simplifiée d’un réfrigérateur à tube d’impulsion (PTR), couramment utilisé pour refroidir des matériaux à quelques degrés au-dessus du zéro absolu en comprimant et en dilatant de l’hélium gazeux maintenu sous haute pression. Les chercheurs du NIST ont optimisé l’efficacité du PTR, réduisant considérablement le temps et l’énergie nécessaires pour atteindre des températures ultra-froides, en ajustant continuellement la valve reliant le tube à impulsions à un réservoir d’hélium. Crédit : S. Kelley/NIST