Un modulateur mis au point par des chercheurs de l’ETH Zurich a franchi la barre des térahertz. Le composant ultrarapide transmet efficacement de grands volumes de données dans le réseau de fibres optiques en peu de temps.
Les modulateurs plasmoniques sont de minuscules composants qui convertissent les signaux électriques en signaux optiques afin de les transporter dans les fibres optiques. Un tel modulateur n’avait jamais réussi à transmettre des données à une fréquence supérieure à un térahertz (plus de mille milliards d’oscillations par seconde). Les chercheurs du groupe dirigé par Jürg Leuthold, professeur de photonique et de communication à l’ETH Zurich, y sont parvenus. Les modulateurs précédents ne pouvaient convertir que des fréquences allant jusqu’à 100 ou 200 gigahertz, c’est-à-dire des fréquences cinq à dix fois inférieures.
Les modulateurs de ce type pourraient être utilisés partout où de grands volumes de données sont transmis, comme un pont entre le monde électrique et la transmission de données par la lumière. « Les données sont toujours présentes au départ sous forme électrique et, de nos jours, leur transmission passe toujours par des fibres optiques à un moment ou à un autre », indique le professeur Leuthold.
La prochaine génération de communications mobiles (6G) fonctionnera dans la gamme des térahertz. Son épine dorsale – les câbles entre les stations de base – repose sur la technologie des fibres optiques. « Notre modulateur permet de convertir les signaux radio et autres signaux électriques en signaux optiques directement et donc efficacement », ajoute Yannik Horst, qui a travaillé sur ce composant dans le cadre de sa thèse de doctorat.
Également pour la médecine et les techniques de mesure
Bien que le transfert de signaux térahertz sur une fibre optique soit déjà possible d’un point de vue technique, il s’agit d’un processus laborieux qui nécessite actuellement plusieurs composants coûteux. Les nouveaux modulateurs peuvent convertir les signaux directement, ce qui réduit la consommation d’énergie et augmente la précision des mesures. En outre, différents composants sont actuellement nécessaires pour différentes gammes de fréquences. Le nouveau modulateur peut être utilisé avec n’importe quelle fréquence, de 10 mégahertz à 1,14 térahertz. « Nous couvrons toute la gamme de fréquences avec un seul composant. Il est donc extrêmement polyvalent en termes d’applications », explique à nouveau M. Horst.
Parmi les autres applications potentielles, citons la transmission de données par fibre optique à l’intérieur des centres de calcul à haute performance et entre eux. Enfin, les composants présentent également un intérêt pour les technologies de mesure à haute performance, notamment les techniques d’imagerie en médecine, les méthodes spectroscopiques pour l’analyse des matériaux, les scanners de bagages dans les aéroports ou la technologie radar. Certains dispositifs de ce type fonctionnent déjà aujourd’hui dans la gamme des térahertz.
Le nouveau modulateur est une minuscule nanostructure composée de divers matériaux, dont l’or, qui utilise l’interaction entre la lumière et les électrons libres présents dans l’or. La technologie a été développée à l’ETH Zurich et le dispositif a été fabriqué par Polariton Technologies, une spin-off de l’ETH issue du groupe de Leuthold. L’entreprise travaille actuellement à la commercialisation du modulateur térahertz afin qu’il puisse être largement utilisé dans de futures applications de transmission de données et de technologie de mesure.
Légende illustration : Le modulateur (en or) transfère l’information d’une onde électrique à une onde optique. (Illustration : Johannes Grewer / Polariton Technologies)
Horst Y, Moor D, Chelladurai D, Blatter T, Fernandes S, Kulmer L, Baumann M, Ibili H, Funck C, Keller K, Destraz M, Heni W, Chérix L, Liu Y, Wang H, Koepfli SM, Leuthold J: Ultra-Wideband MHz to THz Plasmonic EO Modulator. Optica 2025, 12: 325, doi: 10.1364/OPTICA.544016