La manipulation de la matière à l’échelle microscopique représente désormais une réalité tangible dans le domaine des sciences des matériaux. La dernière découverte des laboratoires de l’Université d’État de l’Oregon pourrait marquer un tournant pour l’industrie médicale et robotique. L’élaboration de structures capables de mouvements autonomes, comparable au fonctionnement musculaire, redéfinit les possibilités technologiques actuelles.
Les élastomères à cristaux liquides (LCE) ont été développés par une équipe dirigée par Devin Roach au sein du Collège d’ingénierie de l’OSU. La particularité de leurs structures réside dans leur capacité à effectuer des mouvements complexes – ramper, se plier, se contracter – dès la fin du processus d’impression. Les propriétés uniques de ces matériaux sont obtenues grâce à une technique d’impression tridimensionnelle spécifique.
Également connue sous le nom de fabrication additive, l’impression 3D permet de créer des objets une couche à la fois. Dans le traitement numérique de la lumière, la lumière est utilisée pour durcir la résine liquide et la transformer en formes solides avec précision. Toutefois, l’alignement des molécules d’élastomères peut s’avérer difficile.
« L’alignement des molécules est la clé pour libérer tout le potentiel des LCE et permettre leur utilisation dans des applications fonctionnelles avancées« , a indiqué M. Roach. M. Roach et les autres chercheurs ont fait varier l’intensité du champ magnétique et ont étudié comment celui-ci et d’autres facteurs, tels que l’épaisseur de chaque couche imprimée, affectaient l’alignement des molécules. Ils ont ainsi pu imprimer des formes complexes d’élastomères cristallins liquides qui se modifient de manière spécifique lorsqu’ils sont chauffés.
« Nos travaux ouvrent de nouvelles perspectives pour la création de matériaux avancés qui réagissent à des stimuli de manière utile, ce qui pourrait déboucher sur des innovations dans de nombreux domaines« , a ajouté M. Roach.
Des applications médicales concrètes
Le professeur adjoint de génie mécanique Roach a précisé : « Les LCE agissent comme des moteurs souples. Leur compatibilité avec le corps humain les rend particulièrement adaptés aux applications médicales« . Les domaines d’application envisagés comprennent l’administration ciblée de médicaments, la création de stents pour des interventions chirurgicales localisées, ainsi que la fabrication d’implants urétraux destinés au traitement de l’incontinence.
L’efficacité des LCE repose sur l’association de deux propriétés fondamentales : l’anisotropie et la viscoélasticité. La première caractérise la dépendance directionnelle des propriétés du matériau, comparable à la résistance du bois selon son grain. La seconde combine les attributs des substances visqueuses, telles que le miel, avec l’élasticité propre au caoutchouc. Les changements de forme sont contrôlés par l’alignement précis des molécules au sein du matériau.
Une prouesse technologique collaborative
Un consortium international, regroupant des chercheurs de Harvard, de l’Université du Colorado et des laboratoires nationaux Sandia et Lawrence Livermore, a mis au point une méthode novatrice d’alignement moléculaire. Le processus utilise un champ magnétique durant l’impression 3D par traitement numérique de la lumière. L’intensité du champ magnétique et l’épaisseur des couches imprimées ont été minutieusement étudiées pour optimiser l’alignement moléculaire.
Les recherches complémentaires, publiées dans Advanced Engineering Materials, explorent les capacités d’amortissement mécanique des LCE. L’impression 3D par écriture directe d’encre permet la fabrication de dispositifs d’amortissement efficaces sur une large gamme de fréquences. Les secteurs industriels visés incluent l’automobile pour les systèmes de suspension, le génie civil pour la protection parasismique des bâtiments, et les infrastructures de transport pour la stabilisation des ponts.
Légende illustration : Les structures en élastomère cristallin liquide imprimées peuvent ramper, se plier et s’enclencher directement après l’impression.
Article : « Digital Light Process 3D Printing of Magnetically Aligned Liquid Crystalline Elastomer Free–forms » – DOI: ( 10.1002/adma.202414209 ) – Oregon State University – Publication dans la revue Advanced Materials / 29-Oct-2024
Source : OSU