L’hydrogène vert, souvent considéré comme un carburant d’avenir, repose sur des processus complexes de production énergétique. Cependant, le coût élevé des matériaux catalytiques et leur faible résistance dans des environnements alcalins ont longtemps freiné son adoption à grande échelle. Une récente percée scientifique pourrait toutefois inverser cette tendance en proposant une solution plus abordable et durable.
Des chercheurs de l’Institut coréen de recherche sur les normes et les sciences (KRISS) ont mis au point un matériau qui améliore significativement les performances des catalyseurs utilisés dans l’électrolyse de l’eau. Ce procédé, essentiel à la production d’hydrogène vert, nécessite des catalyseurs capables de séparer efficacement l’eau en hydrogène et oxygène. Jusqu’à présent, des métaux précieux tels que le platine ou l’iridium étaient employés, mais leur coût prohibitif et leur dégradation rapide limitaient leur utilisation.
Le KRISS a introduit une alternative basée sur des métaux de base, enrichis par une petite quantité de ruthénium (Ru) dans une structure combinant dioxyde de molybdène et nickel-molybdène (MoO2-Ni4Mo). Le ruthénium, sous forme de nanoparticules inférieures à 3 nanomètres, forme une couche protectrice qui prévient la dégradation du dioxyde de molybdène en milieu alcalin.
Les performances surpassent les attentes
Les tests réalisés ont montré que ce nouveau catalyseur présente une durabilité quatre fois supérieure et une activité six fois plus élevée que les matériaux commerciaux actuels. Lorsqu’il est associé à une cellule solaire tandem pérovskite-silicium, il atteint une efficacité de conversion solaire-hydrogène de 22,8 %. Cette performance souligne sa compatibilité avec les sources d’énergie renouvelable, un aspect crucial pour une transition énergétique réussie.
Un autre avantage notable concerne son fonctionnement dans l’eau salée. Les catalyseurs ont prouvé leur capacité à produire de l’hydrogène de haute qualité même en présence de sel, réduisant ainsi les coûts liés à la désalinisation. «Actuellement, la production d’hydrogène vert nécessite de l’eau purifiée, mais utiliser directement de l’eau de mer pourrait sensiblement diminuer les coûts», a affirmé le Dr Sun Hwa Park.
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Un pas vers une solution économique et écologique
L’introduction de catalyseurs à base de métaux peu coûteux marque un changement notable dans l’industrie de l’hydrogène vert. En remplaçant les métaux précieux par des alternatives plus accessibles, la barrière financière à leur adoption s’amenuise. La recherche menée par le KRISS illustre comment des ajustements microscopiques – ici l’ajout de ruthénium – peuvent entraîner des progrès macroscopiques dans la durabilité et l’efficacité.
La capacité de ces catalyseurs à résister aux environnements alcalins résulte d’une analyse approfondie des causes de dégradation. Les ions hydroxyde (OH-) identifiés comme responsables ont été contenus grâce à une stratégie ingénieuse d’intégration du ruthénium. Ce travail méthodique montre que des solutions techniques complexes peuvent être élaborées pour répondre aux exigences industrielles modernes.
Quelles implications pour l’avenir ?
Avec une efficacité accrue et des coûts réduits, ces innovations contribuent à rendre l’hydrogène vert plus accessible. L’utilisation potentielle de l’eau de mer constitue une avancée particulièrement intéressante, car elle permettrait de contourner les contraintes liées à l’accès à de grandes quantités d’eau douce purifiée. Ces développements positionnent la technologie AEM comme une option viable pour une production massive d’hydrogène.
Les efforts du KRISS ouvrent de nouvelles possibilités pour l’industrie énergétique mondiale. Des applications pratiques devraient émerger dans les années à venir, confirmant ou non les promesses initiales de cette technologie. Pour l’instant, elle représente une étape importante dans la quête d’un système énergétique plus propre et plus abordable.
Légende illustration : Catalyseurs pour l’électrolyse de l’eau AEM développés par KRISS. Credit : Korea Research Institute of Standards and Science (KRISS)
Article : « Exsolved Ru-mediated stabilization of MoO2-Ni4Mo electrocatalysts for anion exchange membrane water electrolysis and unbiased solar-driven saline water splitting » – DOI : 10.1016/j.apcatb.2024.124364