L’article 225 de la loi Grenelle 2 de juillet 2010 a confirmé le principe d’une communication obligatoire des informations de RSE (responsabilité sociale d’entreprise) dans le rapport de gestion des entreprises, élargit le champ au-delà des seules sociétés cotées et inscrit la nécessité de vérification par un organisme tiers de ces données encore peu fiabilisées.
En attendant le décret et l’arrêté définitifs de la loi, le Cabinet Deloitte a tenu à analyser ces pratiques volontaires de vérification et a également mesuré le chemin qui reste à parcourir pour répondre aux futures obligations légales et réglementaires.
La RSE a fait l’objet de discussion lors de la table ronde du Grenelle consacrée à la gouvernance.
Un comité opérationnel a travaillé sur le thème « entreprises et RSE » au cours de l’hiver 2008 et ses propositions sont à l’origine du programme d’action est prévu à l’article 53 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative au Grenelle de l’environnement.
Il s’agit notamment :
- de développer l’information sociale et environnementale communiquée par les entreprises à l’attention de leurs parties prenantes (actionnaires, salariés, ONG, riverains, etc.) ;
- d’impliquer les institutions représentatives du personnel dans les discussions sur les enjeux de développement durable liés à l’activité des entreprises ;
- de développer des référentiels de développement durable par secteurs d’activités ;
- de soutenir le développement de « labels » permettant de donner une reconnaissance aux bonnes pratiques sociales et environnementales des entreprises ;
- D’assurer la promotion de l’investissement socialement responsable.
Les pratiques actuelles de vérification externe des entreprises du SBF120
• Près de la moitié des entreprises du SBF 120 (44%, soit 53 sociétés) – y compris 35 sociétés du CAC40 – ont fait vérifier par un tiers une partie de leurs informations de développement durable relatives à l’exercice 2010. C’est 10% de plus que pour l’exercice précédent. Toutes les entreprises ayant recouru à cette pratique les années précédentes ont renouvelé l’exercice en 2010.
• 83% des entreprises concernées par la vérification sur l’exercice 2010 ont fait le choix de confier les travaux à au moins un de leurs commissaires aux comptes.
• 89% des entreprises ayant fait vérifier par un tiers une partie de leurs informations développement durable font mener des travaux de vérification suivant la norme ISAE3000* débouchant sur l’émission d’une « assurance »
Parmi les 16 indicateurs vérifiés en moyenne :
• plus de la moitié d’entre eux sont des indicateurs environnementaux,
• près de 40% sont des indicateurs qui concernent le social et
• 10% portent sur le sociétal.
Les perspectives pour l’application de l’article 225 de la loi Grenelle 2
Aucune entreprise du SBF120 ne réalise déjà de manière volontaire les travaux de vérification tels qu’exigés par l’article 225 de la loi Grenelle 2 et son projet de décret. Les vérifications actuelles sont très souvent limitées en termes de périmètre couvert (sites industriels, principales business units pour l’environnement,…) et de nombre d’indicateurs vérifiés.
Parmi les 44% des entreprises du SBF120, les taux de vérification volontaire des thématiques et/ou indicateurs présentés dans le dernier projet de décret d’application – version du 22 août 2011 – sont très hétérogènes :
En matière environnementale :
• 42% du SBF120 font vérifier leurs émissions de gaz à effet de serre ;
• 24% leurs déchets (production et/ou traitement) ;
• 9 % leurs consommations de matière première.
• Aucune ne fait vérifier les informations relatives à la biodiversité.
En matière sociale :
• 28% du SBF120 font vérifier les indicateurs relatifs aux accidents de travail (nombre et taux de fréquence principalement) ;
• 23% leurs effectifs (évolution et répartition par catégorie ou zone géographique) ;
• 7 % les informations relatives à l’emploi et l’insertion des handicapés.
• Aucune ne fait vérifier les informations relatives au respect des principes de l’Organisation Internationale du Travail.
En matière sociétale :
• 8% du SBF120 font vérifier des informations concernant leur politique d’achat durable (audits sociaux des fournisseurs principalement) ;
• 7% leurs actions de partenariat ou de mécénat.
• Aucune ne fait vérifier les « autres actions engagées en faveur des droits de l’Homme ».
D’après Deloitte, les défis à relever et les efforts à fournir sont encore importants pour une grande majorité des entreprises. Ils devront porter notamment sur l’élargissement du périmètre de reporting RSE en essayant de tendre vers celui du reporting financier, sur l’évaluation de la pertinence des indicateurs et de leur compatibilité au niveau international, sur l’implication d’un plus grand nombre d’acteurs internes dans l’élaboration des informations à produire pour permettre leur vérification et sur la fiabilisation de la remontée des informations en formalisant les procédures, en renforçant les contrôles internes et en impliquant l’audit interne.
« A l’heure du Grenelle 2, la France ouvre une ère nouvelle dans la communication des entreprises et la promotion de la RSE. Véritable tendance de fond, ce cadre réglementaire en émergence s’inscrit dans l’avènement progressif de la notion de « reporting intégré » et dans l’élaboration de nouveaux modèles de développement des entreprises. Les décideurs économiques et politiques ont besoin de comprendre les performances des entreprises dans leur globalité, en imbriquant les aspects économiques et financiers traditionnels et les critères extra-financiers » a précisé Eric Dugelay, Associé Responsable de l’Offre Responsabilité Sociale et Environnementale chez Deloitte.
Et d’ajouter : « Il devient à présent impératif de gagner en fiabilité et en crédibilité car aujourd’hui, ces données sont loin d’avoir la robustesse des informations financières. Les dispositifs de contrôle interne renforcés et la vérification externe par un acteur indépendant permettront ainsi l’amélioration de leur qualité et une plus grande confiance des parties prenantes. »
* « L’International Standards on Assurance Engagements 3000 » est retenue notamment par les commissaires aux comptes et issue de « l’International Federation of Accountants » (IFAC). Cette norme permet l’émission, a minima, d’une assurance modérée sur certaines informations de développement durable. 10 entreprises demandent à leur(s) vérificateur(s) d’émettre une assurance raisonnable sur une partie de leurs informations de développement durable, le reste des indicateurs étant souvent couvert par une assurance modérée (9 entreprises ont ainsi des attestations d’assurance « mixte »).
* Données issues des informations extra-financières publiées par les entreprises du CAC 40