L’innovation technologique dans le domaine de la récolte d’eau atmosphérique connaît des développements majeurs, particulièrement dans les zones arides comme l’Arabie Saoudite. Une équipe internationale de chercheurs a mis au point un dispositif novateur qui pourrait transformer radicalement les méthodes de collecte et d’utilisation de l’eau dans les environnements désertiques.
L’Arabie Saoudite, dotée d’abondantes ressources solaires, a massivement investi dans la technologie des cellules photovoltaïques. Actuellement, l’énergie solaire représente plus de 80% de la capacité en énergie verte du royaume. Cependant, un paradoxe se présente : les cellules solaires risquent de surchauffer lors de leur fonctionnement.
Pour résoudre cette problématique, une équipe internationale de recherche, dirigée par le Professeur Qiaoqiang Gan de l’Université KAUST, a conçu une solution novatrice. Leur dispositif fonctionne sans électricité, extrayant l’eau de l’air uniquement grâce à la gravité et utilisant des matériaux peu coûteux et facilement accessibles.
Le système remplit une double fonction : il maintient les cellules solaires et autres technologies à semi-conducteurs à une température optimale, tout en produisant de l’eau qui peut être réutilisée pour l’irrigation, le nettoyage, le refroidissement des bâtiments équipés de cellules solaires, et d’autres applications.
Une technologie basée sur les ressources atmosphériques
Les scientifiques estiment que l’atmosphère contient six fois plus d’eau que tous les cours d’eau douce réunis. «Cette eau peut être collectée par des technologies de récolte d’eau atmosphérique» a précisé le Professeur Gan. Bien que ces technologies fonctionnent de manière satisfaisante, dans les environnements arides comme celui de l’Arabie Saoudite, elles nécessitent de l’électricité pour récolter des quantités d’eau significatives.
Cette demande en électricité risque de freiner l’adoption des cellules solaires dans les régions rurales du royaume, où l’infrastructure électrique est coûteuse. L’efficacité limitée des systèmes actuels s’explique en partie par l’adhérence de l’eau à la surface du dispositif de récolte.
Le Professeur Dan Daniel et Shakeel Ahmad, post-doctorant dans le groupe de Gan, ont découvert qu’en ajoutant un revêtement lubrifiant composé d’un mélange de polymère commercial et d’huile de silicone, ils pouvaient collecter davantage d’eau en s’appuyant uniquement sur la gravité.
Shakeel Ahmad a expliqué : «Un défi courant dans les systèmes de récolte d’eau atmosphérique est que les gouttelettes d’eau ont tendance à rester accrochées à la surface [du dispositif], nécessitant une collecte active du condensat. Notre revêtement a effectivement éliminé ce problème, permettant une véritable collecte passive de l’eau». Il a ajouté : « Comme ce système fonctionne entièrement par refroidissement radiatif passif, il ne consomme aucune électricité. »
Des résultats encourageants et des avantages économiques
Le nouveau dispositif a été testé six fois sur une période d’un an dans des conditions naturelles à Thuwal, une ville située à environ 100 km au nord de Djeddah. Les résultats ont montré qu’il pouvait presque doubler le taux de collecte d’eau par rapport aux technologies alternatives de récolte d’eau atmosphérique.
Au-delà de l’efficacité de la collecte d’eau, le Professeur Daniel s’est montré enthousiaste quant aux avantages économiques de l’adoption de cette technologie. Il a souligné : «Le système ne consomme aucune électricité, ce qui entraîne des économies d’énergie. De plus, il ne dépend d’aucune pièce mécanique comme des compresseurs ou des ventilateurs, réduisant ainsi la maintenance par rapport aux systèmes traditionnels, ce qui conduit à des économies supplémentaires».
Légende illustration : Le dispositif de refroidissement passif renvoie l’énergie thermique vers le ciel tout en collectant l’eau par simple gravité et sans électricité. ©2024 KAUST.
Article : ‘Lubricated Surface in a Vertical Double-Sided Architecture for Radiative Cooling and Atmospheric Water Harvesting’ / ( 10.1002/adma.202404037 ) -King Abdullah University of Science & Technology (KAUST) – Publication dans la revue Advanced Materials