L’imagerie 3D à distance, bien qu’encore confrontée à des contraintes environnementales et techniques, connaît une évolution significative grâce à des innovations technologiques récentes. Parmi celles-ci, un système LiDAR reposant sur la détection de photons uniques promet d’offrir des images haute résolution à des distances jusqu’alors inaccessibles. L’intérêt pour cette méthode réside dans sa capacité à fonctionner même dans des conditions défavorables, telles que la présence de fumée ou de brouillard dense.
Un groupe international de chercheurs a développé un système LiDAR capable de capturer des images tridimensionnelles d’objets situés à plus d’un kilomètre de distance. Ce dispositif repose sur la mesure du temps de vol d’un photon unique, une approche qui permet d’obtenir des données précises tout en minimisant l’utilisation de lasers puissants. Une telle performance se traduit par une capacité accrue à visualiser des objets cachés derrière des obstacles naturels ou artificiels.
L’amélioration technique ainsi conçu a permis d’augmenter le nombre de photons diffusés collectés depuis une cible lointaine, ce qui se traduit par une résolution spatiale nettement accrue. Aongus McCarthy, membre de l’équipe de recherche basée à l’université Heriot-Watt au Royaume-Uni, a souligné : “Leur système utilise un détecteur de photons unique deux fois plus performant que ceux employés dans des systèmes similaires décrits par d’autres groupes de recherche et affiche une résolution temporelle au moins dix fois supérieure.”
Dans leur article publié dans Optica, les chercheurs ont montré que leur système pouvait reconstruire une image 3D parfaitement identifiable d’un visage humain situé à 325 mètres. La collaboration entre plusieurs institutions — dont les universités de Glasgow et Heriot-Watt, ainsi que le Jet Propulsion Laboratory de la NASA et le MIT — a été essentielle pour atteindre un tel résultat.
Mesures de profondeur et applications potentielles
La technologie mise en œuvre repose sur le principe du temps de vol lumineux. Un pulse laser est émis vers un point précis d’un objet, puis le temps nécessaire pour que celui-ci revienne au système est mesuré afin de calculer la distance. Ces mesures sont ensuite répétées pour différents points de l’objet afin de reconstituer une représentation tridimensionnelle complète.
Un détecteur ultrasensible appelé détecteur de photons uniques à nanofils supraconducteurs (SNSPD), développé conjointement par les équipes du MIT et du JPL, a joué un rôle central. Ce type de détecteur peut percevoir un seul photon, ce qui autorise l’utilisation de lasers à faible puissance, y compris ceux jugés sans danger pour les yeux humains. Pour réduire les niveaux de bruit, ce dispositif a été refroidi à une température proche de 1 Kelvin grâce à un système cryogénique compact conçu par l’université de Glasgow.
De telles capacités offrent des opportunités pour identifier des objets distants dans divers environnements ou surveiller des mouvements de bâtiments ou de falaises rocheuses afin d’évaluer des risques potentiels comme des glissements de terrain. “Ce type de système pourrait conduire à des améliorations dans les domaines de la sécurité et de la surveillance”, a affirmé McCarthy, premier auteur de l’étude. Il a ajouté : “Il pourrait, par exemple, acquérir des images de profondeur détaillées à travers de la fumée ou du brouillard et dans des scènes encombrées.”
Tests sur le terrain et performances exceptionnelles
Pour valider leurs travaux, les chercheurs ont effectué des tests sur le campus de l’université Heriot-Watt en mesurant des objets situés respectivement à 45 mètres, 325 mètres et 1 kilomètre. Ils ont utilisé une cible imprimée en 3D comportant des piliers de tailles et de hauteurs variées afin d’évaluer la résolution spatiale et de profondeur.
Les résultats ont révélé que le système pouvait distinguer des détails aussi fins que 1 mm en plein jour, à 45 et 325 mètres, surpassant ainsi les performances précédentes d’un facteur dix. Une image 3D d’un visage humain a également été capturée à ces distances avec un temps d’acquisition de 1 milliseconde par pixel, un laser de 3,5 mW jugé sûr pour les yeux et un traitement minimal des données.
McCarthy a ainsi expliqué : “La résolution de profondeur exceptionnelle du système signifie qu’il serait particulièrement adapté pour imager des objets derrière des obstacles tels que des feuillages ou des filets de camouflage, un scénario difficile pour un appareil photo numérique.” Par exemple, il serait possible de distinguer un objet situé à quelques centimètres derrière un filet de camouflage, là où des systèmes moins performants échoueraient.

Perspectives futures et optimisations possibles
Bien que les essais sur le terrain aient été limités à une portée d’un kilomètre, les chercheurs envisagent de tester leur système à des distances allant jusqu’à 10 km. Ils souhaitent également explorer son potentiel pour l’imagerie à travers des obscurcissements atmosphériques tels que la fumée et le brouillard.
Des efforts supplémentaires seront consacrés à l’utilisation de méthodes de calcul avancées pour accélérer l’analyse des données et permettre l’imagerie de scènes encore plus éloignées. McCarthy a conclu : “Puisque les détecteurs SNSPD peuvent fonctionner à des longueurs d’onde supérieures à 1550 nm, cette conception pourrait également faciliter le développement d’un système LiDAR à photon unique dans l’infrarouge moyen, augmentant encore davantage les capacités d’imagerie à travers le brouillard et la fumée.”
Légende illustration : Mesures de profondeur et d’intensité effectuées à une distance de 325 m à la lumière du jour
Article : « High-resolution long-distance depth imaging LiDAR with ultra-low timing jitter superconducting nanowire single-photon detectors » – DOI : optica-12-2-168&id=567815