Dans un contexte où les émissions de gaz à effet de serre continuent d’alourdir le bilan environnemental des transports, la récupération d’énergie perdue sous forme de chaleur s’impose comme une alternative digne d’intérêt. Une partie substantielle de l’énergie issue des carburants fossiles s’échappe inutilement par les systèmes d’échappement. Comment transformer cette perte en une ressource exploitable tout en réduisant la consommation de carburant et les émissions polluantes ? Une équipe internationale de chercheurs a exploré cette question avec un dispositif novateur.
Un prototype conçu pour convertir la chaleur perdue
Un groupe de scientifiques dirigé par Wenjie Li et Bed Poudel a mis au point un système thermo-générateur compact capable de transformer la chaleur résiduelle des gaz d’échappement en électricité. Leur approche repose sur l’utilisation d’un semi-conducteur composé de bismuth-telluride, un matériau reconnu pour ses propriétés thermoélectriques. Ce choix technique n’a pas été réalisé au hasard : il permet de simplifier la conception tout en augmentant l’efficacité du système. Les chercheurs ont également intégré des échangeurs de chaleur similaires à ceux utilisés dans les climatiseurs, optimisant ainsi la capture de la chaleur issue des conduits d’échappement.
Le dispositif inclut un élément essentiel appelé radiateur thermique, qui régule la température et amplifie la différence thermique nécessaire à la production électrique. Cette différence de température influence directement la puissance générée. Le prototype a atteint une puissance de sortie de 40 Watts, suffisante pour alimenter une ampoule standard. Selon les chercheurs, «les conditions de flux d’air élevées, telles que celles présentes dans les tuyaux d’échappement, améliorent considérablement l’efficacité».
Des performances adaptées aux véhicules rapides
Lors de tests simulés reproduisant des environnements à haute vitesse, leur système thermo-générateur a montré une polyvalence remarquable. Pour des vitesses d’échappement comparables à celles des voitures, il a produit jusqu’à 56 Watts. En revanche, dans des conditions similaires à celles des hélicoptères, la puissance atteignait 146 Watts, soit l’équivalent de cinq ou douze batteries lithium-ion 18650 respectivement. leurs résultats démontrent clairement que les applications potentielles ne se limitent pas aux automobiles.
Un autre avantage notable réside dans la simplicité d’intégration proposée par ce système. Contrairement à nombre de dispositifs existants, aucun système de refroidissement supplémentaire n’est requis. Leur technologie peut être directement incorporée dans les sorties d’échappement actuelles sans modification majeure. Cela réduit non seulement les coûts d’installation mais aussi les contraintes techniques liées à leur mise en œuvre.
Une contribution significative aux initiatives énergétiques durables
La recherche menée par l’équipe de Wenjie Li et Bed Poudel a été publiée dans la revue ACS Applied Materials & Interfaces. Elle montre l’importance de développer des solutions capables de répondre à la demande croissante d’énergie propre. L’étude explique comment les moteurs à combustion interne, qui équipent encore une majorité des véhicules, gaspillent trois quarts de l’énergie potentielle du carburant sous forme de chaleur perdue via les gaz d’échappement.
«Notre travail pourrait faciliter l’intégration pratique des dispositifs thermoélectriques dans les véhicules à grande vitesse», ont affirmé les chercheurs. Leur déclaration mérite attention car elle illustre l’ambition de rendre ces technologies accessibles et exploitables à grande échelle. En effet, si elles sont adoptées massivement, ces innovations contribueront à réduire la consommation de carburant et les émissions de dioxyde de carbone associées.
Vers une adoption généralisée ?
Bien que les résultats obtenus soient encourageants, plusieurs défis demeurent avant une adoption généralisée de tels systèmes. Par exemple, la fabrication de matériaux semi-conducteurs performants doit être rentabilisée pour garantir leur viabilité économique. De plus, il est crucial d’évaluer la durabilité de ces dispositifs sur le long terme afin d’assurer leur fiabilité dans des conditions variées.
Cependant, les implications positives ne se limitent pas uniquement à l’industrie automobile. Les drones et autres véhicules aériens non pilotés pourraient également bénéficier de cette technologie. Ainsi, chaque secteur concerné verrait son empreinte écologique atténuée grâce à une meilleure gestion de l’énergie perdue.
Légende illustration : Des chercheurs conçoivent et testent un système de récupération de la chaleur perdue, illustré ici, qui se fixe au tuyau d’échappement d’une voiture et convertit la chaleur des gaz d’échappement en énergie. Les rainures en éventail à l’extérieur du tuyau sont le côté froid du dissipateur thermique du dispositif et les composants triangulaires à l’intérieur du tuyau sont des échangeurs de chaleur à plaques. Crédit : ACS Applied Materials & Interfaces (2025).
Rabeya Bosry Smriti et al, Thermoelectric Energy Harvesting for Exhaust Waste Heat Recovery: A System Design, ACS Applied Materials & Interfaces (2025). DOI: 10.1021/acsami.4c18023